Charlie enchaîné

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« À quoi servons-nous au juste ? »

Jean-Baptiste Thoret à l’Amazonas Film Festival (suite)

lundi 24 décembre 2007, par Charlie enchaîné

“Après avoir remercié Coca et Nissan, firmes partenaires dont le militantisme écolo n’est plus à prouver, Edouardo Braga, le gouverneur d’Amazonas pour qui la cause écologique constitue un formidable argument électoral (...), rend hommage à Caca Diegues, figure majeure du cinéma brésilien sur lequel nous savons peu mais dont le festival ne montrera rien. L’homme monte sur scène, récupère un trophée en bois et disparaît.

Très vite, je réalise combien nous, journalistes boyscoutisés dont il s’agit de remplir les mirettes, sommes là pour constater la beauté de la forêt amazonienne, donner à manger à des dauphins roses sous haute surveillance locale, faire mumuse et des photos avec des minisinges peu farouches, s’esbaudir devant des buffets dispendieux, se gaver de caïpirinhas et de soupes aux piranhas, observer de loin des grappes de gamins des bidonvilles sauter dans l’Amazone, enchaîner les croisières pipoles sous un soleil de plomb et applaudir aux spectacles kitsch de troupes locales.

À quoi servons-nous au juste ? À transformer la préservation de la forêt amazonienne en cheval de Troie d’un formidable business écologique, marché d’avenir où viendront s’installer des armées d’entrepreneurs malins, des vedettes désireuses de se redorer à peu de frais le blason moral et des politiques en quête d’un marché électoral.”

« Festival de Manaus — Taxi 5 en Amazonie », par Jean-Baptiste Thoret, Charlie Hebdo n°807, 5/12/2007.

P.-S.

Autre extrait du même article de J.-B. Thoret : « Les perles de Manaus ».

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