Charlie enchaîné

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Deux regards sur la situation colombienne

lundi 14 janvier 2008, par Charlie enchaîné
mise à jour : jeudi 28 février 2008

L’affaire des otages détenus par les Farc intéresse actuellement beaucoup la presse en raison de l’annonce, puis de la libération récente de deux d’entre eux. Charlie Hebdo puis Le Canard enchaîné ont consacré des articles à la complexe situation colombienne. Charlie enchaîné fait aujourd’hui le point avec un article d’Antonio Fischetti paru dans Charlie le 26/12/07 (« Pas d’Ingrid sous le sapin ») et une Prise de Bec du Canard parue le 02/01/08 (« Les Farc — L’art de faire parler la poudre ») sous la plume de Frédéric Pagès.

On se souvient qu’un première promesse de libération de trois otages colombiens avait été faite le jour de Noël [1]. Pas de chance pour Charlie, c’était un mardi, jour de bouclage. Malgré l’incertitude, Antonio Fischetti tentait d’analyser la situation : « On se réjouit évidemment de cette libération annoncée (...). Mais inutile de s’emballer outre mesure. » Le journaliste de Charlie, qui suit ce dossier de près et en informe régulièrement les lecteurs de l’hebdomadaire, rappelle que les Farc (Forces armées révolutionnaires de Colombie) disposent encore de 43 otages, « dont Ingrid ». Il explique que cette dernière constitue « leur atout le plus précieux », du fait de son statut médiatique. Même remarque de Frédéric Pagès, qui note que « la valeur médiatique de l’otage [grimpe] à proportion de sa médiatisation. Ingrid Betancourt ne sera donc pas la première libérée. Mais peut-être bien la dernière... »

Le Canard enchaîné précise que la cinquantaine d’otages détenus dans la jungle dont on parle généralement sont « des politiques », auxquels il faut ajouter « de simples particuliers, parfois des mômes, ou des membres de la police et de l’armée ». On estime à 800 le nombre d’otages détenus par les Farc, la plupart colombiens. Frédéric Pagès rappelle que les Forces armées sont à l’origine « un mouvement d’autodéfense paysan, qui fait jonction avec le parti communiste ». Aujourd’hui, soit plus d’une quarantaine d’années après, « les Farc réclament la souveraineté nationale (contre l’ingérence des États-Unis), la justice sociale, et des terres pour les paysans ». Le journaliste du Canard trace ainsi la ligne politique commune entre celles-ci et Hugo Chavez, éclairant ainsi le rôle de médiateur du président du Venezuela, qui est le « seul homme politique du continent » en lequel Marulanda, le chef des Farc, a « confiance ».

Violence

Pour Antonio Fischetti, la libération des otages passe par « la diplomatie », car « si les Farc pouvaient être vaincues militairement, ça se saurait ». C’est pourquoi la position du président colombien Uribe est déterminante dans cette affaire. Le journaliste de Charlie explique que seules quelques concessions de sa part pourraient faire avancer les choses. « Démilitariser un parcelle rurale de 30km de côté pendant 45 jours, ce n’est pas ça qui va faire vaciller l’État », écrit-il. Mais Uribe le refuse « pour le symbole de faiblesse [que cela] représente à ses yeux ». Finalement, Fischetti renvoie les deux parties dos à dos : d’un côté, « la cruauté stupide des Farc », de l’autre l’« arrogante inflexibilité théorique » d’Uribe, dont il rappelle la « complaisance (...) pour les paramilitaires d’extrême droite, responsables de milliers d’assassinats ». Le journaliste met dans la balance la « souffrance (...) des otages ».

Le Canard ne se prononce pas sur des solutions pour résoudre le conflit, mais évoque également « les paramilitaires », auxquels il ajoute des « parlementaires (...) inculpés de complicité avec les milices d’extrême droite », qui bénéficient « d’une loi, votée par le président Uribe, garantissant des peines légères [à ceux] (...) qui passeraient aux aveux ». En effet, en 1984-1985 environ 3 000 « membres des Farc et du M19 (...) furent trucidés par l’armée et les milices paramilitaires de l’AUC qui, aujourd’hui encore, font disparaître des milliers d’opposants » [2]. Ainsi, Frédéric Pagès rétablit lui aussi une forme d’équilibre dans la violence, en parlant, pour les Farc, de « l’indéniable cruauté de l’“armée du peuple” et [de] ses treillis » qui « s’enfoncent dans (...) l’abjection » à cause du « trafic de coke » et du « commerce d’otages ».

P.-S.

Ajout du 16/01/08. Deux liens parvenus par le biais d’un commentaire (non publié) :
- « Ingrid Betancourt, la Don Quichotte de Colombie », sur le site Radio-Canada.ca, avec notamment un reportage sur sur le narcotrafic en Colombie.
- « Les Verts entre le marteau et l’enclume », par Alain Lipietz.

Notes

[1] La libération de deux otages, Clara Rojas et Consuelo Gonzalez, est finalement intervenue le 10 janvier 2008.

[2] Pour un résumé de l’histoire des guérillas en Colombie, voir « 50 ans de guerre en Colombie » (Le Monde diplomatique).


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