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Jean-Michel Thénard et Le Canard épinglés

mercredi 31 octobre 2007, par Charlie enchaîné
mise à jour : jeudi 3 avril 2008

Luc Douillard s’en prend par deux fois (en deux jours) au Canard enchaîné et en particulier à l’un de ses journalistes, Jean-Michel Thénard. Il accuse ce dernier de complaisance envers BHL et Jean-Louis Borloo, et lui reproche d’avoir réhabiliter des syndicalistes dans l’affaire Gautier-Sauvagnac. Éclairage.

Premier épisode : l’« éloge » de BHL

Dans un billet daté du 30 octobre 2007, le blogueur Luc Douillard s’étonne que « Le Canard enchaîné [fasse] l’éloge de BHL » [1]. Selon lui, l’hebdomadaire satirique aurait brandi « l’hypocrite encensoir de la presse peopolisée » que Le Canard dénonce pourtant chaque semaine. Il y voit là « un de ces symptômes qui ne trompent pas sur une maladie corruptrice qui a déjà normalisé le « Libération » de Sartre, et aligné « Le Monde » sur ce qu’autorisent à penser les marchés financiers ». Douillard estime que Le Canard s’est livré à « un compliment aussi imprévu qu’obséquieux pour le dernier ouvrage (fort dispensable) de Bernard-Henri Lévy ».

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« BHL entre cadavre exquis et canapé Royal » (Docs en stock)
Article de Jean-Michel Thénard paru dans Le Canard enchaîné n°4539 (24/10/2007)

Une petite phrase, au détour d’un article de Jean-Michel Thénard à propos du dernier livre de BHL (voir ci-contre), a retenu l’attention du blogueur critique : « La fidélité à ses convictions n’est pas chose si fréquente en ces temps de rupture qu’il ne faille la saluer ». Cela ne lui a pas plu de la lire dans Le Canard. Luc Douillard réserve ses plus vifs reproches à l’auteur de l’article. Pour lui, Jean-Michel Thénard fait figure de « drôle de recrue » au Canard enchaîné. Il rappelle que celui-ci était « directeur adjoint de « Libération », dont il fut très longtemps chef des pages politiques ».

Amer, le blogueur ajoute à propos du nouveau journaliste de l’hebdomadaire satirique : « Thénard au « Canard », ça sonne désespoir, c’est très inquiétant pour cet irremplaçable espace de liberté ». Selon lui, J.-M. T. poursuivait deux objectifs. Premièrement « faire passer aux yeux des lecteurs du « Canard » notre BHL pour un phare de la pensée ». Et deuxièmement « placer (...) dix lignes dégoulinantes de ségolènisme ». Finalement, Douillard veut croire à un accident. « Mon cher Canard, je te lis depuis ma plus tendre adolescence, qui eut lieu sous Pompidou. Mon cher Canard, réveille-toi, ressaisis-toi, car on n’en croit pas nos yeux ! », conclut-il.

Réactions. Ce billet de Luc Douillard a suscité plusieurs commentaires. L’un d’entre eux rappelle que « Thénard n’est pas le seul journaliste de Libération à avoir été embauché au Canard : Didier Hassoux et Dominique Simmonot l’y ont précédé ». L’auteur du commentaire en déduit que le papier de J.-M. T. n’est pas un « accident » et, après avoir adressé d’autres reproches au Canard, il s’interroge : « Leur absence de publicité ? Elle sert à quoi, si, comme sur France-Inter et France-Culture, elle n’est qu’un argument de marketing pour ne rien dire sur l’essentiel ? ».

D’autres internautes, certains lecteurs du Canard depuis plusieurs dizaines d’années, font part de leur commentaire. L’un note une « différence de ton incroyable » par rapport à celui des années 70. Un autre estime que « tout ce qui est écrit n’est pas parole d’évangile ». Plus loin on nous rappelle que « deux semaines plus tôt, Le Canard raillait BHL et son non-ralliement affiché dans un article intitulé “Bernard Henry lévite” » [2]. Plusieurs lecteurs se disent « surpris », voire « choqué », à la lecture de l’article incriminé, et déclarent qu’ils vont écrire au journal pour faire part de leur étonnement.

Parmi les commentaires, on peut également lire quelques phrases de soutien à l’hebdomadaire satirique. « La chronique de Simonnot n’est pas si mal faite. Elle manque un peu d’acidité pour être conforme au ton traditionnel du Canard, mais c’est pas mal quand même. », écrit un internaute. Un autre tempère : « Cela étant dit, la réaction qui consiste à dire “je ne lirai plus le Canard” est excessive, non ? ». Le dernier mot revient (à l’heure où ces lignes sont rédigées) à Olivier Mérou : « Je trouve que vous volez dans les plumes du “Canard” pour bien peu de choses. » Pour lui, « il arrive sur certains points que le Canard déconne », mais il demande : « Que faire alors ? Ne lire aucune presse ? Ou que la presse militante estampillée “pure radicale vraie de vraie” mais qui peut balancer aussi de sacrées conneries ? ». « La chasse au “Canard”, ça sera sans moi », précise-t-il.

Deuxième épisode : Borloo et la « réhabilitation » des syndicats

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« Jean-Louis Borloo De l’écolo dans son vin » (Prises de Bec)
Article de Jean-Michel Thénard paru dans Le Canard enchaîné n°4540 (31/10/2007)

Le deuxième billet de Luc Douillard, daté du 31 octobre, est cette fois dirigé avant tout contre Jean-Michel Thénard qui, selon le blogueur, « persiste et signe » [3]. Tout d’abord « Jean-Michel Thénard tente de faire passer Jean-Louis Borloo pour un type sympa, bon vivant, chaleureux, et sincèrement attaché à la cause de l’environnement », écrit-il. Dans la Prises de Bec, J.-M. T. mentionne que Borloo a débuté en politique à Génération écologie (voir ci-contre, à gauche). Selon Douillard, ce mouvement était « une officine (...) destinée seulement à contrer les Verts ».

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« Gautier-Sauvagnac bienfaiteur social ? »
Article de Jean-Michel Thénard paru dans Le Canard enchaîné n°4540 (31/10/2007)

Le blogueur préfère s’attarder sur un autre reproche qu’il adresse au journaliste du Canard. D’après lui, « à propos de l’affaire Gautier-Sauvagnac, il essaie d’instrumentaliser « Le Canard » dans une tentative inouïe de réhabilitation des syndicalistes achetés discrètement par l’UIMM. » (voir ci-contre, à droite) Il prête l’intention suivante à J.-M. T. : « Les syndicats sont évidemment innocents, car c’est l’UMP qui aurait lancé l’accusation ! ». Ses mots se font plus virulents : « Jamais depuis cent ans, on n’avait ainsi pris les lecteurs du « Canard » pour des imbéciles. » À nouveau, Luc Douillard met en garde l’hebdomadaire satirique : « Chers amis « vieux » rédacteurs et dessinateurs du « Canard », voici venu le moment de vous inquiéter si vous ne voulez pas être progressivement mis de côté, et ceci avec le déshonneur de l’infamie. »

Pour appuyer sa démonstration, Douillard cite Libération qui « révèle qu’un syndicaliste CFTC, Jean-Claude Duret, a bien fait l’objet d’une tentative de corruption par l’IUMM », puis écrit qu’ainsi « Thénard est démenti le jour même de sa lamentable tentative de réhabilitation de la corruption ». Un des commentaires du billet interpelle le blogueur : « On n’a pas du lire le même papier… je pense que la rage vous aveugle un peu. » Ce lecteur n’a pas la même interprétation du papier de Jean-Michel Thénard. « Il démontre simplement le fait qu’on a braqué les projos sur les syndicats alors qu’à la base on a constitution d’une caisse noire et corruption de la part du patronat », estime-t-il. Ce qui lui fait dire « Autant je comprends le papier sur BHL, autant là je vous suis pas… ».


Sur le même thème :
- « L’omniprésence médiatique de BHL est aussi passée par les hebdomadaires satiriques »
- « Le Canard remet BHL à sa place »

P.-S.

Avec cet article, Charlie enchaîné inaugure une rubrique Fausse note, destinée à recueillir des critiques trouvées ici ou là à l’attention des deux hebdomadaires satiriques. Dans le cas présent des reproches sont formulés à la fois à l’égard du Canard enchaîné, et surtout à l’encontre d’un de ses journalistes, Jean-Michel Thénard. Charlie enchaîné souhaite apporter sa modeste contribution à ce débat, en suggérant que, même si d’aucuns considèrent l’arrivée des journalistes de Libération comme représentant un danger pour l’hebdomadaire satirique, on peut simplement souhaiter que ce soit Le Canard enchaîné qui influence ces nouveaux arrivants et non l’inverse, pour que perdure « l’esprit Canard »...

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