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La Sarkomegalie à l’épreuve de la crise financière européenne

mardi 25 mai 2010, par Hadi Taibi

Psychodrame après psychodrame, l’Europe fait son nid. Il faut cependant faire attention, car, dans ce poulailler, Angela la pondeuse aux œufs d’or est l’unique femelle. Elle fait couple avec Nicolas qui, dans la basse cour, aime bien faire le coq. Il veut tout contrôler, ne rien laisser au hasard. Jusqu’à la vente des œufs d’or à découvert, à ne plus savoir pourquoi ; jusqu’au cumul des déficits, à ne plus savoir comment. Son comportement pâtit d’un orgueil démesuré qui ne supporte aucune opposition, ni reproche. Le coq n’a pas toujours raison, mais il n’a jamais tort.

De la Grèce préhistorique à la péninsule ibérique, en passant par la Rome antique, on redoute les sorties de Sarko. Dans les moments difficiles, lui seul connaît la réponse. On n’ose plus la chercher ailleurs. Il est en passe de devenir le maître incontesté en matière de déficits publics : il prête pour rembourser et rembourse pour emprunter. Durant le post-partum, période durant laquelle on a la fâcheuse tendance à couler d’un peu partout, Sarko eut la génialissime idée de s’équiper de credit default swaps, qui servent de contrat d’assurance sur la dette, pour éponger les fuites. Qui dit mieux ?

Par ailleurs, Sarko en veut terriblement aux mauvais élèves qui, à ses yeux, ne font pas suffisamment preuve d’audace. La recherche continuelle de l’agitation doit présider à tout processus de sortie de crise. Les budgets de la Défense sont inversement proportionnels aux résultats macro-économiques de la Grèce, particulièrement, mais aussi d’autres pays aux déficits élevés, tels le Portugal ou l’Espagne, mais on leur interdit d’y toucher, car Paris et Berlin conditionnent leurs aides au maintien en l’état des contrats d’armements…

La crise de la dette souveraine qui secoue l’Europe aujourd’hui n’est pas plus relative aux liquidités qu’à la solvabilité, voire tout simplement à la crédibilité, des États membres de la zone euro. Une fois n’est pas coutume, on ne peut rien reprocher à l’Inde, ni à la Chine. Seuls les gouvernants, qui permettent aux banques de tricher sous l’œil passif de monsieur Trichet, sont responsables de la dissimulation des actifs pourris, de la limitation des sorties de liquide, de la spéculation sur les dettes, des falsifications de bilans des institutions financières et de leurs comptes de résultats et le pire de tout, l’aide à la création des bulles financières que les banques ont, par la suite, crevé à leur seul profit et celui de leurs dirigeants soupçonnés de délit d’initié.

Pourquoi diantre vouloir à tout prix coller l’accusation à Arcelor Mittal lorsqu’il décide de délocaliser en Inde, où les salaires sont moitié moins élevés qu’en France, alors même que ce fleuron de la métallurgie a été abandonné par ses amis actionnaires européens après son financement aux frais du contribuable français ? Mittal va, en clair, faire travailler ses concitoyens et faire tourner l’économie de son pays, préférant légitimement la construction d’une modernité sociale en Inde à la destruction de la modernité économique en Europe.

Il est absurde que de croire la thèse de Sarko selon laquelle les ingénieurs indiens seraient moins bons ou moins performants que ceux de la France. C’est même le contraire qui peut s’avérer vrai, notamment dans les emplois tertiaires. À être trop plein de pensées stupides, on se sent parfois bien vide. Sinon, qu’est-ce qui empêcherait la France de rapatrier ses usines de construction automobile éparpillées aux quatre coins de la planète ? Le libre-échange, dont se revendique monsieur le président, n’est pas un club d’échangisme…

Les rêves reflètent des désirs, des peurs, et la réalité que l’on ne peut assumer. Il serait intéressant d’accorder une place à ceux du coq Sarko, sans lesquels la vie des Français risque très vite de devenir ennuyeuse. Il rêvait d’une mandature sans histoire ; il risque, avec la perte des tous les repères, de la finir sans géographie.


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