Charlie enchaîné

Une revue de presse de Charlie Hebdo et du Canard enchaîné.
Et un peu plus.

Accueil du site > Coin des rédacteurs > Chroniques > Le grand emprunt avant la grande pagaille

Le grand emprunt avant la grande pagaille

mercredi 21 avril 2010, par Hadi Taibi

Qui va à la chasse, perd sa place ! Nicolas veut chasser sans aller à la chasse, sa place étant trop chère à ses yeux pour la risquer de la sorte ; il n’est pas bête le gars. Il charge le duo Alain-Michel [1], grands obsédés de la chasse avec les finances publiques, pour lui trouver les bons terrains et lui indiquer les bonnes périodes pour la chasse. Et ça marche !

Torses bombés, ils vont sillonner la France pour le recensement des propriétaires de chiens de chasse ; on n’investit pas, évidemment, dans l’acquisition d’animaux ; on se contentera de les emprunter, question de les faire tourner, de les envoyer se promener, de les faire profiter des bienfaits de l’oxygénation de nos forêts et, de façon générale, de les rentabiliser. Et ça marche encore !

On trouve les emprunteurs de chiens prêts à surenchérir, les terrains de chasse pour les expérimentations utiles, mais toujours pas de gibiers en ces périodes de crise, peu propices à la chasse. Le renouvellement des espèces prend du temps. Et l’ex-DRH du Parti Socialiste se reconvertit, pour la circonstance, en DFC (Finances et Comptabilité) de la République et se charge pour dégager les financements nécessaires pour l’importation, à partir des Amériques, de la faune qui sera destinée, tout naturellement, à être chassée.

Compte tenu des dégâts occasionnés à Harvard des suites du passage du cyclone financier, favorisé par des placements aventureux consentis par des experts du domaine, Nicolas trouve la parade en suggérant, dans son guide du “bon chasseur”, que l’utilisation des moyens empruntés sera confiée aux dix meilleures Harvard de France, dirigés par des avares du financement commercial de la recherche, qui s’emploieront à chercher comment rembourser, à moindre coût, la dette contractée pour eux.

Les fonds levés par l’emprunt national seront affectés à des organismes gestionnaires qui les gèrent de manière étanche par rapport au reste du budget de l’État (extrait du rapport Alain-Michel) ; ce qui signifie que les chiens empruntés ne seront pas ajoutés à l’ardoise du déficit public, ni remboursés à leurs propriétaires à partir de la trésorerie de la collectivité nationale, au cas où un malheur leur arrivera.

L’intérêt de leur emprunt sera exclusivement dans les dividendes du gibier qu’ils aideront à chasser ; et quand on sait qu’aussi bien la chasse que la recherche ont un caractère aléatoire, et qu’elles ne peuvent jamais être soumises à une obligation de résultats, on sera légitimement portés à croire qu’une dette aussi détestable soit-elle sera toujours mieux supportée qu’un nouvel emprunt, même quand celui-ci est fortement désiré.

Notes

[1] La commission Rocard-Juppé, chargée de se pencher sur le « grand emprunt » souhaité par le président Nicolas Sarkozy.


Commenter cet article





Suivre la vie du site RSS 2.0 | Plan du site | Espace privé | SPIP | squelette