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Les DOM ont tranché

mercredi 13 janvier 2010, par Chantal Sayegh-Dursus

Seul l’autisme avéré d’une certaine classe politique aura laissé croire que l’article 74 de la Constitution aurait pu être voté « en l’état ».
Mots-clés : Antilles, référendum

Malgré l’appel aux urnes des représentants politiques locaux, la Guyanaise Christiane Taubira, Radicale de Gauche, et le Martiniquais Alfred Marie-Jeanne, Indépendantiste, l’ensemble des électeurs ont massivement dit « non » à l’article 74, lors du référendum organisé par le gouvernement le 10 janvier dernier (78,6% en Martinique et 69,8% en Guyane).

Camouflet ou manque de réalisme ? Tout avait pourtant été bien élaboré en France, sous l’œil attentif de quelques observateurs Domiens, mais la consultation et la participation des Ultramarins avait été exclue. Il était à prévoir que cette façon de procéder ne pouvait que susciter une confiance fort mitigée des intéressés. Méfiance et suspicion ont donc été les maîtres mots envers tout ce qui a pu en résulter.

Le LKP s’étant désolidarisé dès le départ, jugeant cette mesure prématurée, la Guadeloupe ne serait pas consultée. Tout fut donc préparé pour isoler la Guadeloupe de la Guyane et de la Martinique.

- Des billets anonymes, de tous bords, discréditaient, point par point, l’action des manifestations de 2009.
- Un harcèlement et un déni de droit frappaient d’ostracisme les avocats qui avaient soutenu le LKP.
- Un désinvestissement programmé de certaines sociétés nationales, qui n’hésitèrent pas à rapatrier leurs cadres, comme si le département se trouvait en zone de guerre et de non-droit. Alors qu’a contrario, les effectifs de la gendarmerie étaient augmentés de façon plus qu’importante.
- Un étranglement voulu de toute nouvelle initiative locale par certains grands patrons bénéficiant déjà de monopoles. Leur mot d’ordre : mettre le Guadeloupéen moyen à genou. Donc un appauvrissement programmé du département, assorti d’un tarissement des crédits et d’un encadrement encore plus drastique de ceux accordés aux petits entrepreneurs locaux. Les empêchant par là-même de redresser leurs entreprises après les évènements. Au contraire, des groupes comme la Sara (Société anonyme de raffinerie des Antilles, dépendant du groupe Total) continuèrent de bénéficier de compensations financières substantielles (44 millions d’euros en 2009) et surtout eurent la possibilité d’augmenter encore davantage des marges déjà controversées.
- Tout cela fut assorti d’un oubli délibéré des accords signés pour l’encadrement de la vie chère ; donc un pied de nez manifeste à tous les engagements pris.

Le Domien se trouve dans une situation kafkaïenne. Il a des velléités de prendre en main son avenir économique et financier, mais se trouve confronté à une gestion qui le déroute car rien ne l’a préparé à y faire face.

- La facture énergétique de la Guadeloupe pourrait être nulle, car le département dispose d’importantes sources d’eau chaude. Mais aucune mesure n’est prise dans ce sens, à cause du monopole des sociétés nationales.
- Les DOM produisent du cacao et du sucre et pratiquent l’élevage bovin, pourtant aucune fabrique de chocolat digne de ce nom n’y a jamais été initiée.
- Malgré la possibilité de champs de coton, aucune filature, aussi petite soit-elle, n’y a jamais été tentée. Et la banane vendue à perte occupe la majorité des terres cultivables. De plus, l’OMC a récemment validé des droits d’importation très bas pour la « banane dollar », à l’intérieur de l’UE.
- Bien que possédant un littoral maritime non négligeable, aucun marais salants n’a jamais été créé, donc aucune boîte de sel marin n’est produite dans les DOM. 
- Les ressources de la mer des Antilles sont majoritairement exploitées, avec l’accord de Paris, par les États-Unis, le Mexique ou le Japon [1]. Alors que les Malouines se sont enrichies et ont acquis une indépendance financière totale, grâce aux droits de la mer que leur verse ces mêmes pays. De plus, avec le soutien de l’Angleterre, elles ne devraient pas tarder à faire valoir également leur droit à une plateforme maritime riche en énergie [2].
- La Guyane a des ressources aurifères non négligeables ; aucune mesure n’a été prise pour les préserver, voire les exploiter, dans l’intérêt des habitants de ce département. Elle est par conséquent régulièrement pillée par des illégaux brésiliens. Une compagnie d’orpaillage canadienne en lorgnerait l’exploitation. Mais avec quelle contrepartie pour les Guyanais ?

Il est à espérer que, dans la crise qui nous frappe et pour la bonne gestion de nos finances nationales, la gestion de nos DOM soit désormais faite de façon plus cartésienne.

Voir en ligne : Démenti cinglant aux velléités d’autonomie des DOM

Notes

[1] La pêche ne sert qu’à l’approvisionnement local et la presque totalité du poisson consommé est importé surgelé.

[2] Les droits de mer de Saint-Pierre et Miquelon avaient déjà été cédés, en 1992, par la France au Canada. Ils essaient maintenant désespérément, sous l’œil goguenard de Paris, de récupérer une partie de leur plateforme maritime contenant du pétrole.


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