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Les bateleuses au chevet du chevalier d’Émeraude

mardi 18 mai 2010, par Hadi Taibi

« On reconnaît le grand amour lorsqu’on s’aperçoit que le seul être au monde qui pourrait vous consoler est justement celui qui vous a fait mal. » (Guillaume Musso)

Crédit photo : François Lafite/Flickr.

Tout ce dont Sarko a besoin pour survivre, c’est d’une personne qui l’aime vraiment. Et sur ce plan, il a beaucoup de chance d’être aimé par deux personnes plutôt qu’une. Michèle la justicière et Christine la trésorière l’aiment à ne plus savoir ce à quoi d’autre elles peuvent bien être utiles, si ce n’est à obéir au doigt et à l’œil au chevalier d’Émeraude, le sauveur du monde. On s’attache souvent aux personnes pour qui on pensait n’avoir aucun amour et on en devient carrément dépendant.

Les deux ministres doivent se disputer cependant le titre étincelant de “dame de cœur” de leur président chéri. Madame Lagarde prend garde à ne pas irriter son bien-aimé, en mettant un peu de zèle dans sa gestion de son non moins bien-aimé bouclier fiscal. Quant à Madame Alliot-Marie, elle ne trouve meilleur bouclier protecteur pour son futur ex-président que la suppression pure et simple du juge d’instruction.

Ainsi va la vie : elle nous propose une version de l’existence sans point, ni virgule. Mesdames les ministres se chargent de ponctuer la vie des Français. Et c’est cette ponctuation qui fait la différence. À en juger par leurs atermoiements pour boucler deux dossiers inoculables, qui risquent de transmettre leurs méfaits sur plusieurs générations venantes, on comprendra mieux l’acharnement à vouloir donner l’impression que tout va à merveille dans leurs secteurs respectifs… Que le peuple ne s’inquiète cependant pas, après tout, ce n’est qu’une impression !

En effet, choisies comme option “plaisir à la carte” plutôt que comme menu traditionnel, la ministre de l’Économie et celle de la Justice travaillent d’arrache-pied, la première pour rapatrier les déserteurs fiscaux et la seconde pour expatrier les désertiques fiscaux. Leur imagination et leur espoir sont les choses les plus importantes qu’elles puissent posséder pour continuer d’exister : l’imagination leur offre un but et l’espoir celui d’y parvenir.

Pendant ce temps, le chevalier d’Émeraude, qui ne manque ni de conviction, ni de fantaisie en amour, use de tout subterfuge qui lui permet d’exercer un pouvoir quasiment magnétique sur son entourage affectif et de l’amener à évoluer selon des schémas qui lui sont propres. Par son charivari permanent, ses rivaux ne semblent avoir aucune parade, ni les moyens pour y résister ; ils font pâle figure face à ses excès impulsifs. Ce qui est fatiguant dans cette histoire, ce n’est pas l’effort que fournissent les ministres à chercher les réponses aux questionnements de la société, mais de vérifier la véracité de leurs réponses.

Mesdames les ministres aiment follement le président. Elles ont peur de le perdre dans deux ans. Toute affaire cessante, elles passent leur temps à l’aimer. Elles ne déjeunent plus, parce qu’elles l’aiment ; elles ne dînent plus, parce qu’elles l’aiment ; elles ne soupent plus, parce qu’elles l’aiment ; elles ne dorment plus, parce qu’elles ont faim. Ainsi va la vie : comme aux échecs, à la fin de la partie, autant les pions que le roi seront rangés ensemble dans la même boîte.


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