samedi 6 septembre 2008, par Charlie enchaîné
À l’origine était le largonji, un des langages à clés de la petit pègre parisienne. Alors que l’argot a son vocabulaire propre, le largonji consiste à se rendre incompréhensible en déformant les mots français selon une règle immuable : remplacer la consonne initiale par un l, la rejeter en fin de mot et la compléter par un suffixe. Ainsi « jargon » devient « largonji » et « boucher », « louchébem ».
Les « Mémoires » publiés sous la signature de Vidocq nous apprennent que, sous la Restauration, les voyous appelaient « Lorcefé » la prison de La Force, où pouvait les conduire le vol d’un « Larfeuille » (un « feuillard », c’est-à-dire un portefeuille) s’ils n’opéraient pas en « loucedé » (en douce) dans un « loinqué » (coin). Autant de termes qui auront la vie dure dans le langage populaire, malgré la fortune d’autres cryptages comme le cadogan, le javanais ou le verlan. Traduction de « fou » en largonji, le mot « loufoque » est, quant à lui, entré dans le dictionnaire.
« Voyage dans les microlangues — Une langue bien aiguisée : le louchébem » (extrait), par Professeur Anatra, Le Canard enchaîné n°4583, p. 5, 27/08/08.