Charlie enchaîné

Une revue de presse de Charlie Hebdo et du Canard enchaîné.
Et un peu plus.

Accueil du site > Coin des rédacteurs > Chroniques > Priorité à droite

Priorité à droite

jeudi 31 décembre 2009, par Hadi Taibi

La France entame sa progression dans ce XXIe siècle où elle s’était engagée à le vouloir propre, sain, radieux et où il fera bon vivre pour l’homme qui recouvrera, en la circonstance, tous ses droits fondamentaux ; mais, à la première croisée des chemins, la donne change. L’identité nationale, venant de droite, encombre la route et obstrue le passage. La voie est fermée, l’avancée est colmatée. La priorité à droite ne peut plus, à elle seule, décongestionner le carrefour ; elle n’est plus la solution longtemps recommandée.

Sarkozy et ses sbires refusent de débarrasser cette droite pour débloquer la situation et permettre une fluidité de la circulation, notamment pour toutes ces personnes qui se retrouvent comme prises dans un piège. Ils savent pertinemment que leur présence grotesque et ridiculement introvertie de ce côté-ci de la chaussée est la cause essentielle de la turgescence de l’impulsion sociale, mais ils s’obstinent, malgré tout, à ne pas dévier de leur plan de balade préalablement défini. Telle une machine, ils produisent des images uniquement en faisant mine de suivre leur instinct. Ils agissent à travers une excitabilité totalement erronée et ils tentent de propulser la nation vers des lieux de leur seul “vouloir” et avec les moyens de leur seul “pouvoir”. Sauf qu’en l’absence d’une volonté claire et évidente, c’est la portion en l’homme qui dit « je veux donc je peux » qui se discerne souvent, en lui, comme étant la partie exténuée.

On rivalise d’ingéniosités. On croit tout bonnement qu’une fois allégé de son contenu, le contenant devient plus malléable. Une France dégagée du fardeau de ses immigrés se faufilerait plus aisément entre les mailles culturelles et sociales pour atteindre les cimes de l’émancipation supposée. Pour ce faire, on n’hésite pas à convoquer les méthodes les plus xénophobes, à l’image de cet euphémisme, en vogue durant l’ère soviétique, sous Staline, où l’on a inventé pour les besoins de la propagande communiste, le « cosmopolite sans racine ».

Atteindre l’idéal d’unification des institutions économiques, politiques, linguistiques, juridiques et religieuses est noble en soi ; le fait de toucher à l’universalité sans renier sa particularité reste une entreprise plausible. Et ce qui sera possible pour l’univers le sera incontestablement et de façon autrement plus souple pour la France. Tout autoritarisme qui tend à faire aboutir le projet de l’identité nationale, avec toute l’ampleur et la sensibilité qui la caractérisent, vaudra à ses concepteurs une indigestion mentale qui leur restera au travers du cerveau comme de la nourriture avariée dans l’estomac.

L’hégémonie identitaire n’est certainement pas observée pour le seul plaisir de dominer l’autre ; elle permet aussi aux tenants de cet absolutisme véreux de se cramponner à une illusion de puissance et de solidité. Le moindre relâchement de leur part entrainerait leur chute dans leur faiblesse de base. Et là, il ne s’agit plus simplement du Code de la route, mais, plus gravement encore, du domaine de la psychiatrie.

P.-S.

Illustration : « Embouteillage à Moscou », par Nevermind2 / Wikimedia Commons.

Commenter cet article

1 Message

  • Priorité à droite

    8 janvier 2010 10:04, par hafid
    salut l’ami Ta plume est reconnaissable parmi 100000 autres toujours le verbe en verve et le mot en transe. Ton analyse se voudrait etre l’antidote par lequel la turgescence s’estompe pour laisser place à un langoureux baiser sans chevauchement de la ligne rouge... oh pardon ! je voulai dire jaune.

    Répondre à ce message





Suivre la vie du site RSS 2.0 | Plan du site | Espace privé | SPIP | squelette