jeudi 11 février 2010, par Hadi Taibi
La droite arrive au pouvoir en pleine bourrasque économique. Pour faire face à la crise, Sarkozy œuvre à baisser davantage les prix. Il fait du « travailler plus pour gagner plus » son cheval de bataille, auquel il ajoute « pendant le plus longtemps possible » puisque l’espérance de vie gagne des années supplémentaires. Pour ne pas passer leur vie à se la couler douce, Sarkozy a pensé aux seniors pour les rendre économiquement rentables.
Ce que l’on perdait jadis en années de retraite, on pense le restreindre en produisant toujours plus et plus vite si possible pour gagner plus ; et le soir on passera au comptoir pour consommer le plus qu’on a gagné en travaillant plus. Au bout du compte, on se rend compte que tous les matins, on est appelé à se réveiller un peu plus tôt, se raser un peu plus vite, pour se rendre à son usine un peu plus en forme, pour produire des rasoirs un peu plus performants qui permettent de se raser un peu plus vite le lendemain, pour arriver un peu plus tôt à l’usine. Plus vite on avance et plus vite on crève, semble dire la sentence de Maître Sarkozy. C’est la spirale infernale, pour l’appeler par son nom.
Par ailleurs, on se rend vite à l’évidence qu’aller vite en besogne n’arrange pas forcément les affaires de tous les Français. Un problème vachement plus sophistiqué et autrement inextricable les guette : comment peut-on faire vite lorsqu’on est lesté par un nom, un faciès, une religion ou une couleur de peau qui ne collent plus à une « identité nationale » conçue à la va-vite entre l’euphorie de la victoire électorale et la panique de la défaite des valeurs morales ? Est-il nécessaire d’aller vite quand on est convaincu de ne jamais connaître la ligne d’arrivée ? Car, depuis l’avènement de l’ère sarkozyste, le vite s’avère être plus un frein aux initiatives qu’un accélérateur aux bonnes volontés.
La nature a horreur du vide, Sarkozy la remplit de phrases stériles ; l’âge de la personne a horreur du vite, Sarkozy le désemplit par ses phrases infertiles. Remplir la nature par ce qui vide la vie, voilà ce à quoi consacre son temps Monsieur le Président.
Depuis qu’on travaille plus, les usines délocalisent, l’emploi perd des postes, l’inflation gagne des points, le pouvoir d’achat en perd d’autres, le produit intérieur brut régresse, le déficit public augmente, les produits français perdent en compétitivité, les exportations baissent et jamais le rouge des indicateurs macroéconomiques n’a été aussi vif.
À son privilège personnel, à l’avantage de ses discours, au pouvoir magique de sa politique, Sarkozy, par la fascination de ses paroles, exerce un effet placebo sur ceux qui se l’administrent. Quand l’effet nocebo fera son apparition, ça sera tout simplement l’heure de l’évaluation des dégâts.