mardi 11 mai 2010, par Hadi Taibi
Aujourd’hui plus qu’hier, et certainement bien moins que demain, courir le cotillon ou jouer les Dan Juan s’avère être un sport sensationnel pour les galapiats de tous bords. Sa pratique tape à l’œil produit une impression de surprise, d’intérêt, d’admiration et ce dans ce qu’il suggère dans son côté fortune. Son côté ruine est farci d’atouts de séduction, de fascination ou de projets palpitants. C’est tout ce que ce sport renferme en son sein de mystères, d’énigmes. Tout ce que les Français adorent. Et l’on ne peut s’empêcher de les adorer.
Des cach’ l’ambroule en quantité non négligeable polluent le climat déjà délétère et qui corrompe les esprits sains. Les polissons découvrent leur véritable identité nationale, stigmatisent la différence, interdisent les apparences, autorisent la fourberie et encouragent la gloutonnerie. Dallasser sans prémonition aucune de se lasser ! Tel semble être le credo de la République qui veille au grain.
Le respect ? On l’octroie à la nature pour se donner bonne conscience. On déplace le centre de gravité de la précarité sans agir sur les causes, ni en atténuer les effets. On ne badine tout de même pas avec l’écologie, un sujet trop sérieux dont le pessimisme avéré qui l’entoure se trouve être tempéré par la croyance en la providence divine, seule à même d’empêcher le chaos de la Terre. En attendant, on s’engage, dans un puissant éco-geste, à « ne plus manger de cerises en hiver » [1]. Leur cheminement des Amériques élargit la circonférence du trou de la couche d’ozone. C’est peu comme geste mais c’est déjà mieux que rien.
Et si l’on faisait un calcul empirique et très approximatif sur les dégâts qu’occasionnerait le maudit kilo de cerises qui atterrit sur la table de la ménagère bordelaise, en provenance du Chili ? En retenant l’avion comme moyen de transport, du fait qu’il est le plus polluant de l’atmosphère, l’ordre de grandeur pour les émissions dégagées équivaudrait à 10 fois le poids de la cerise corruptrice. Pour se rendre à Paris en provenance de Bordeaux, toujours en avion, l’éco-boycotteur de la cerise chilienne dégagerait, en CO2, 15 fois plus que la cerise, avec quelques variations selon que l’on soit en été ou en hiver. Seul le producteur chilien en souffrirait au final.
Qu’a-t-il bien pu arriver à la France des heureuses coïncidences, des vers de circonstance, des épîtres, des odes rêveuses, des élégies, des Héroïdes, des ballades, des romans exotiques et frénétiques, de la poésie lyrique, du théâtre pittoresque, de la littérature de l’imaginaire, de la musique douce, agréable et sans heurt ? Trop de loyautés verticales mélangées à trop d’infidélités horizontales tue ce qu’en l’homme est le plus précieux : sa spiritualité.
Un conseil ? Lisez Hugo ! Admirez Van Gogh ! Méditez Baudelaire ! Valsez aux airs de Chopin ! Écoutez Mozart ! Ça change radicalement l’homme, ça l’apaise, ça l’adoucie, sans porter préjudice à la nature. Et les cerises se porteront mieux là où elles poussent.
[1] Je ne mangerai plus de cerises en hiver... est le titre du dernier livre d’Alain Juppé, paru en 2009 aux éditions Plon.